« Si je devais demander qu’on mette une inscription sur mon tombeau, je n’en voudrais d’autre que celle-ci : ‘Il fut l’Individu’ ». Si ce mot n’est pas encore compris, il le sera un jour » écrivait Kierkegaard. Son vœu fut exaucé.Accéder à l’individualité était pour lui le devoir le plus sacré. Il vit bien que Socrate, qui fut son premier maître, s’était déjà engagé sur cette voie, ce qu’il paya de sa vie, mais le christianisme, dit-il, alla plus loin que lui, mettant en demeure l’homme de se réveiller du sommeil de l’immédiateté, de s’édifier afin de devenir soi-même. De très bonne heure, Kierkegaard avait compris que, loin d’être un simple concept formel, l’individualité était le principe suprême de l’existence. Tout individu particulier est entièrement différent qualitativement de tous les autres. Aussi sa singularité, lorsqu’elle se nourrit de l’universalité ontologique, divine, qui est aussi une Unicité, a une valeur infinie. Penser l’individu dans sa difficile genèse comme l’a fait Kierkegaard à partir de sa propre trajectoire est sans doute le meilleur remède à proposer à l’homme contemporain, meurtri par les excès d’un individualisme exacerbé, paradoxalement incapable d’individualité véritable, crispé sur un ego infirme car replié sur la seule dimension finie de la vie. En identifiant le mal, à savoir les dérives naissantes de la modernité, il montra le remède : l’assignation de chacun à l’individualisation personnelle et spirituelle pour conjurer le risque de se perdre.
Agrégée de philosophie, France Farago enseigne en classes prépratoires aux ENS au Lycée Chaptal à Paris. Elle a publié chez Armand Colin notamment L’Art, Le Langage, La Nature, La Justice.
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